Notes de soirée : Education : Ciné-débat "Ce n’est qu’un début"

, par attac92clamart

Ciné-débat

« CE N’EST QU’UN DEBUT »

 

Introduction

Après avoir organisé des soirées autour de nombreux sujets (souffrance au travail, justice fiscale, l’eau, etc.…), le groupe ATTAC-CLAMART inaugure un nouveau cycle sur le thème de l’éducation.Ecouter, réfléchir, échanger pour garder en éveil notre curiosité, notre appétit d’apprendre : voilà ce que ce cycle nous propose d’entreprendre.Démarrer le cycle par un film sur la petite enfance s’impose au groupe et Christophe Duthoit, programmateur du cinéma Jeanne Moreau, accepte la proposition. Le film « CE N’EST QU’UN DEBUT » est retenu et Jean-Pierre Pozzi, l’un des deux réalisateurs, est disponible pour participer à la soirée.

 

L’origine du film

En 2007 une phrase de Michel Onfray lors d’une émission sur France Inter déclenche la curiosité de Cilvy Aupin, la productrice du film : « Tous les enfants naissent philosophes, seuls certains le demeurent… » Michel Onfray parle du questionnement des enfants et de cette formidable dynamique non entretenue. Le film est né de la rencontre avec Pascaline Dogliani, qui anime des ateliers à visée philosophique en maternelle et des réalisateurs Jean-Pierre Pozzi et Pierre Barougier.C’est Anne-Claire Beurthey, du magazine Pomme d’Api, qui parle à Cilvy Aupin de Pascaline Dogliani, professeure des écoles et maître formateur au collège Jacques Prévert du Mée-sur-Seine, petite commune comptant 89 nationalités différentes, près de Melun.L’institutrice a initié quelques mois auparavant des ateliers de philosophie avec sa classe et veut poursuivre à la rentrée suivante. La rencontre a lieu en juillet avec sa directrice Isabelle Duflocq et Jean-Charles Pettier, professeur à l’IUFM de Créteil, partenaires du projet sur l’école. Les réalisateurs, Jean-Pierre Pozzi et Pierre Barougier, souhaitent suivre à deux caméras tous les ateliers qui vont se faire, au départ pour un an. Finalement, il a fallu deux ans de tournage.Le documentaire « Ce n’est qu’un début » retrace les 2 années de cette expérience où les élèves via les ateliers philosophiques échangent librement et spontanément leurs idées sur des sujets tels que la liberté, la mort, la justice, l’amitié.La philosophie – littéralement “amour de la sagesse” – n’a pas d’âge pour être enseignée. De même, le goût pour le questionnement, pour la curiosité, pour l’attention à l’autre n’a pas d’âge pour être cultivé.

La philosophie une histoire ancienne

A quoi bon faire de la philosophie avec de si jeunes enfants ?On voit très vite que l’objectif est de construire une « école de la liberté et de la démocratie » à laquelle contribuent aussi les parents. Cet échange génère des liens sociaux, une motivation réelle et le sens de l’argumentation et de l’écoute.Déjà, à l’Antiquité, il était régulièrement question de l’âge idéal pour commencer à philosopher.Les stoïciens le situaient à partir de 14 ans, de son côté, Epicure, dans la lettre à Ménécée, écrivait :« Quand on est jeune, il ne faut pas hésiter à s’adonner à la philosophie et quand on est vieux il ne faut pas se lasser d’en poursuivre l’étude. Car personne ne peut soutenir qu’il est trop jeune ou trop vieux pour acquérir la santé de l’âme. »

Le rituel

« Une bougie pour essayer de penser »« Est-ce que quand on pense ça se voit ? »Unanimement ils ont dit « Non »L’atelier philosophique démarre avec un rituel en deux temps : l’institutrice allume la bougie et déclare « La séance est ouverte ». Mise en situation utile pour certains, conditionnement pour d’autres, in fine cela devient normal pour chaque enfant de laisser parler l’autre, de ne pas se moquer, de comprendre qu’ils sont dans un moment à visée philosophique.La caméra fait partie du rituel, au même titre que la bougie, ce qui permet aux deux réalisateurs de se faire accepter.

Le langage du corps

« Est-ce qu’il y a quelque chose que vous ne pouvez pas faire maintenant mais que vous pourrez faire plus grand ? »Parfois peu de réponses verbales des enfants, mais des mimiques et des expressions corporelles, haussement d’épaule, dodelinement de la tête, à 4 ou 5 ans la pensée s’exprime autant par le corps que par la parole.Difficile au début pour la maitresse de se mettre en recul et laisser parler les enfants, ne pas chercher à répondre, mais relancer la question, une véritable posture, pas toujours naturelle pour un enseignant. Pascaline l’institutrice a traversé des moments de doute.

Les paroles d’enfants

Au cours des ateliers la maîtresse interpelle les enfants pour que la parole circule avec cette phrase « Vous êtes d’accord ou pas avec ça ? ».Les paroles d’enfants qui nous donnent à méditer :« Moi, je dis que la liberté, c’est quand on peut être un petit peu seul, respirer un peu et être gentil ».« Pour moi, la liberté, c’est quand on sort de prison ».« Moi, je veux savoir un truc. Les pauvres, comment ont-ils fait pour être pauvres ? »« Ce n’est pas parce que l’on n’est pas d’accord avec quelqu’un qu’il faut le taper ».« Si on se pardonne ça veut dire qu’on va s’aimer encore ».« Les cadeaux sur la tombe ça ne sert à rien, c’est pour la décoration ».« Le problème quand on est mort c’est que l’on ne peut plus se relever ».« Sa maman elle est morte mais elle sera toujours avec lui dans son cœur ».« Maman elle est intelligente car elle ne met pas le Nutella dans le frigo ».« Moi j’aime bien réfléchir, mon cerveau m’aide à penser ».« Moi je n’aime pas parce que la maîtresse nous force à faire de la philosophie ».

 

Les parents

Les parents sont informés des thèmes qui seront abordés une semaine avant, ils participent activement en échangeant avec leurs enfants pendant le dîner ou au câlin du soir. Les ateliers philosophiques ouverts aux parents sont suivis avec intérêt et créent des liens forts avec l’équipe pédagogique.

Le débat

Les ateliers philosophiques favorisent le développement du langage, l’écoute, la compréhension de l’autre non pas sur ses connaissances, mais sur ce qu’il est en tant que personne. Reconnaitre son identité et ses différences, c’est un véritable progrès.L’objectif ce n’est pas que tout le monde s’aime, mais intègre par ces échanges les notions fondamentales des différences qui nous composent et qui nous enrichissent, tels que nos cultes, nos coutumes, nos habitudes socialisantes.Traditionnellement, on ne cherche pas à comprendre le poids des mots : apprendre, travail, effort, réflexion, mort, grandir, amour. On les prend peut-être pour acquis. Mais formaliser le plaisir de réfléchir à ces notions, d’en parler avec les personnes de son âge, c’est aussi prendre conscience de leur importance.Créer un éveil de la réflexion philosophique dès le plus jeune âge et pourquoi ne pas dire « philosophie » si cela conduit vers la construction de concepts, si la base des questions est sur des thèmes essentiels de la vie.

Le public

Une spectatrice :« J’ai vécu un moment de bonheur intense, ça m’a rappelé des moments merveilleux car j’ai enseigné 30 ans en maternelle. La maternelle française est une école magnifique et les enfants naïfs, un ravissement ».Un spectateur :« Cette Pascaline apparaît comme une rebelle car elle apprend aux enfants à réfléchir, alors qu’aujourd’hui on pousse les enfants à réussir. Aucun jugement de la part de cette institutrice, c’est remarquable ».Une spectatrice :« Votre film est remarquable car ce n’est pas une suite d’évènements. On voit naître le citoyen chez l’enfant, avec le titre ’Ce n’est qu’un début’, on espère que ça va continuer ».Une spectatrice :« Pomme d’Api des éditions Bayard Presse sponsorise cet atelier, pourquoi un groupe privé ? Ça devrait être le rôle de l’Education Nationale. Des figurines ont été données par l’éditeur et on les voit très peu dans le film ».Un spectateur :« Je connais une professeure de Mathématiques qui doit enseigner 3 heures de math ; elle en fait 2h30 et la demi-heure restante elle la consacre à la philosophie ».